13.11.04

Cris et chuchotements, d'Ingmar Bergman


Scènes de la vie conjugale m'a donné envie de revoir Cris et chuchotements... petite plongée dans l'univers de Bergman, dans l'image aussi... Très efficace pour se sortir de ses états d'âme perso, ou pour les voir sous un autre angle.
Peu de surprises : ce film est resté gravé dans ma mémoire avec une diabolique précision. Mais peut-être l'avais-je déjà revu depuis mon adolescence. Qu'importe. C'est toujours aussi effrayant, même si ça m'a semblé plus court que dans mon souvenir... Bergman avait une vision étonnante de la condition de femme. Etonnante pour un homme. Et son langage symbolique est très fort, suffisamment pour que j'aie imprimé toutes les images (celles d'Ingrid Thulin miraculeusement trouvée sur un site suédois est l'une des plus fortes de mon souvenir, ceux qui ont vu le film comprendront), et qu'elles me parlent alors même que je n'avais pas d'idée concrète de l'expérience féminine, et peu d'idées sur ce que peut être la vie de couple. Ce qui m'épate, c'est qu'il parvient à la fois, pour une femme au moins, à mettre le spectateur dans un sentiment simultané d'empathie et de rejet violent à l'égard de ses personnages. Je sais que je porte en moi un peu du caractère de chacune de ces femmes et que je dois vivre avec. En même temps, j'ai envie d'éloigner de moi cette perspective, de croire que tout, et moi, peut être totalement différent... Avec les années, je sais qu'il n'en est rien. Je porte en germe ce que sont toutes ces femmes. Il m'appartient seulement de ne pas me laisser enfermer dans des situations qui me rendraient aussi caricaturale qu'aucune d'entre-elles. Dans Cris et chuchotements, je vois ce que je pourrais être si je ne sais pas maîtriser mon destin et mon rapport aux autres. Effrayant ? Certes oui... Roboratif aussi...
En dehors de tout ça, il reste la magnifique esthétique du film, et ce fondu au rouge entre tous les plans, qui m'avait fortement impressionnée lors de ma première vision. Il y avait un débat à la suite du film, et les interrogations sur la symbolique de cette couleur m'avaient semblées très oiseuses : pour moi, sans aucun doute, c'est du sang. Parce que la souffrance des femmes, c'est le sang et les larmes...
La fiche critique du ciné-club de Caen, le fameux site découvert hier, est bien sûr très documentée. Mais j'ai aussi trouvé ces deux critiques de spectateurs, qui me paraissent très intéressantes, d'autant qu'elles sont écrites par des hommes.

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12.11.04

Scènes de la vie conjugale, d'Ingmar Bergman


Je suis une inconditionnelle de Bergman. Depuis longtemps : j'ai vu Cris et chuchotements lors de sa sortie en salle (ça me rajeunit pas). Quand je suis sortie du cinéma, il me restait dans la main quelques miettes de bois : le bâtonnet de mon esquimau que j'avais consciencieusement déchiqueté pendant la séance. J'étais jeune à l'époque (13 ou 14 ans), un peu étonnée d'ailleurs que mon père m'emmène voir de tels films. Mais je lui suis reconnaissante de m'avoir fait connaître tôt celui que je considère comme l'un des plus grands réalisateurs, et j'ai depuis hanté les "cycles Bergman" pour voir et revoir ses films. Ceux qui m'avaient échappé sont maintenant disponibles en vidéo : c'est le cas de Scènes de la vie conjugale, acheté en cadeau pour mon homme depuis... presque deux ans maintenant, et qu'il n'a jamais voulu regarder : ne se sentait pas prêt ! Mais en réalité, on est jamais prêt pour un film de Bergman, la force de son cinéma vous cueille au fond de votre siège quel que soit l'âge ou le moment. Bergman parle de la vie, intimement, de la condition d'être humain, avec une crudité, une réalité et une profondeur à mon avis jamais atteinte par aucun autre. Il pose toutes les vraies questions de la vie, il ose tout. C'est parfois violent. Moi, ça me rassure. Parce qu'en voyant ses films, je sais à quel point je suis humaine, à quel point mes doutes, mes angoisses, mes sentiments, sont partagés par d'autres.
Donc ce soir, j'ai regardé Scènes de la vie conjugale... toute seule. Et je n'ai pas été déçue. C'est puissant, évidemment, et ça pose toutes les questions du couple et de l'amour. De quoi réfléchir pendant longtemps pour explorer tout ce qu'il met en lumière. Ce que j'aime dans Bergman, c'est qu'il va droit au but : aucune scène, aucun plan inutile. Et puis, tout est cadré au plus serré, si près des visages qu'on entre à l'intérieur. Chapeau au passage aux acteurs, car cette manière de filmer ne pardonne rien, et il n'y a pas une fausse note dans cette chronique d'un couple qui se fait et se défait...
Peu de document sur ce film (trop vieux !), mais j'ai quand même trouvé une page web avec la jaquette du DVD, et un synopsis détaillé, sur un site qui a l'air de décortiquer le cinéma, va falloir que je creuse ça. Et puis, j'ai même dégotté une photo de Liv Ullman qui la montre à peu près telle qu'elle est dans le film. Liv Ullman est plus que belle dans ce film, elle est magique, magnifique, et la mobilité extraordinaire de son visage nous donne à voir tous les états d'âme de son personnage, magistralement. Inconditionnelle, je vous dis !!

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