25.12.04

Saraband, d'Ingmar Berman (2)


J'ai enfin pu voir l'œuvre, dont ma Maman m'a enregistré la VO passée sur Arte. Sans doute, ce ne sera pas mon Bergman préféré, en dépit des critiques dithyrambiques de la presse, peut être influencée par le fait qu'il s'agisse de manière quasi certaine du dernier film du « maître »...
Personnellement, je ne suis pas forcément touchée par la mise en scène d'acteurs âgés, qui osent se montrer tels qu'ils sont en dépit des ravages de l'âge. Je considère cette démarche comme normale... même si en effet Bergman est l'un des rares réalisateurs à la mettre en scène. Ce qui m'a en revanche frappée, c'est que Liv Ulmann se met à ressembler à Anna Schygulla, qui fait aussi partie de mes actrices fétiches, dans les expressions les plus douces, les plus féminines de leurs physionomies respectives. En revanche, bien sûr, j'adhère à la musique : Bach est pour moi le musicien qui a le mieux exprimé tous les états de l'âme humaine, et sa musique atteint la perfection.
Bergman n'a rien perdu de sa puissance, de sa violence... et c'est peut-être ce qui m'étonne : à plus de 80 ans, il n'est toujours pas en paix avec lui-même, il ne pardonne rien à personne, et sans doute pas à lui-même. Sa vision du couple apparaît plus tourmentée, plus pessimiste que dans « Scènes de la vie conjugale ». Les années n'adoucissent pas les souffrances, et isolent les individus plus que jamais. La communication, la consolation réciproque, semblent compromises, voire illusoires, et le souvenir des haines est plus vivace que celui des tendresses et de la complicité... bien que le contact de la chair qui fut aimée reste le seul antidote contre l'angoisse de la mort... et peut-être la seule révélation qui permette à Marianne de se sentir enfin mère, de percevoir concrètement ce qu'est le lien du sang...Mais chacun reste malgré tout seul avec ses doutes, et quasi incapable de communiquer avec ses proches.
Davantage que dans ses autres films, la seule lumière potentielle vient des femmes, qui ont sans toujours le savoir, le pouvoir de la dispenser ou non. Mais Johann est jaloux de celle offerte à son fils par Anna, et incapable de capter celle que Marianne est peut-être prête à lui offrir. Et Henrick veut voler celle de sa fille pour remplacer celle de sa femme défunte. Plus que jamais, on se demande ce qui peut rendre ces hommes aimables...et je trouve que Bergman noircit le tableau, sans doute parce que je suis une femme, et que c'est d'abord le regard des hommes qui éclaire ma vie.
Bergman n'a pas de morale, et j'adhère à cette vision du monde : pour se trouver soi-même, et tenter de trouver son alter ego, il faut mettre la morale hors champ, et se mettre à l'écoute de sa voix intérieure, dépouillée de tout le reste. Ce n'est pas la vision de mon père, pour qui l'approche de Bergman est déviante et destructrice. Pour ma mère, ce film ramène à la folie, au dérangement mental, à fuir à tout prix. C'est intéressant de discuter d'un tel film avec ses parents. Eux ne l'ont pas aimé. Moi, quand je vois un Bergman, je ne me demande pas si j'aime ou pas le film. J'aime Bergman parce qu'il me fait réfléchir, parce qu'il m'ouvre des portes mentales et balise mes chemins intérieurs, parce qu'il me permet de comprendre des personnalités différentes de la mienne. Et ce film, comme les autres, ensemence une réflexion qui durera sans doute plusieurs années... Et donc, pour cette seule raison, il s'agit pour moi d'un bon film.
Pour les liens, se reporter à mon premier post sur le film, auquel j'ajoute le post de Valclair, qui en parle assez bien, et que je salue au passage.

Libellés :

0 commentaires:

Enregistrer un commentaire